Oenologie et connaissance de soi avec le MBTI
Il est très souvent agréable de se retrouver autour de bons vins. Les entreprises utilisent beaucoup ce vecteur pour créer des liens internes ou externes. Mais pourquoi ne pas en profiter pour apprendre de façon originale à se connaitre et également en retour mieux apprécier ce que l’on cherche à déguster ?
Par François CHARLES
coach et conseil en stratégie, management et développement personnel, certifié MBTI formation individuels et groupes - www.novial.fr
Les techniciens œnologues vous apprendront l’aspect visuel, la couleur, la robe, la nuance, les niveaux d’intensité, la brillance, la limpidité, la transparence, la viscosité, les larmes ou jambes, l’effervescence. Puis l’aspect olfactif, premier et second nez, mécanisme de l’odorat, la classification des odeurs, des multiples arômes. Ensuite l’aspect gustatif, les saveurs de base. Enfin l’attaque en bouche, l’équilibre, l’évolution, la longueur et l’évaluation générale. Certains s’en souviendront, d’autres pas, d’autres enfin n’auront pas forcément atteint l’objectif demandé mais tous repartirons sans doute en ayant passé un bon moment. Puis ces mêmes personnes iront peut-être dans des formations en salle apprendre certaines méthodes de personnalité pour mieux manager. Pourquoi donc ne pas allier ces deux activités où il s’agira de capitaliser l’activité vécue par des outils de stratégie et de management.
Déjà exposé dans un article sur la sécurité routière, je parlerai ici du MBTI (Myers-Briggs Type Indicator) outil de connaissance de soi le plus utilisé au monde pour identifier nos points forts, points faibles, préférences, choix, zones d’effort et de confort, adapter notre comportement et nos attitudes à certaines situations, gérer le stress, apprécier et doser nos dépenses d’énergie en cas d’événement fâcheux, ainsi que notre volonté et notre nécessité à le faire. L’idéal reste de pouvoir atteindre un certain équilibre et pourquoi pas en matière de dégustation ! N’oublions surtout pas le comportement des autres, qui ont un rôle important dans nos façons d’apprécier, en nous guidant ou nous forçant parfois dans nos choix.
Bien que j’en utilise d’autres (j’ai créé une matrice multi-outils), je considère que le MBTI, issu du modèle de Jung sur le fonctionnement de l’esprit humain, adapté aux Etats-Unis, ou son modèle simplifié (CCTI), est l’outil de base le plus complet pour maitriser à la foi les attitudes et le fonctionnement général. Nous apprenons à « marcher sur nos deux pieds », qui signifie comprendre quel est son pied d’appel, qui ne changera pas, mais aussi que l’autre pied a aussi toute son importance dans l’équilibre. Il est généralement utilisé en ressources humaines, orientation de carrière, coaching relationnel mais je l’utilise aussi dans de nombreux autres cas « métiers » ou pour le sport. Il est possible de le découvrir à l’aide d’un questionnaire de 80 questions ou plus réduit (CCTI), de valider ensuite ses polarités de fonctionnement puis son profil global. Je veille souvent à le ramener à la façon la plus simple et efficace et à la portée de tous pour que les personnes « jouent » facilement avec leurs polarités dans n’importe qu’elle situation, afin de mieux maitriser, anticiper ou réagir face à certaines situations. Et donc pourquoi pas l’utiliser pour mieux se connaitre à travers le vins et mieux apprécier toute dégustation, au-delà même du vin.
Cette approche est enseignée de façon très complète dans des formations traditionnelles de plusieurs jours avec prise de conscience complète des éléments liés et sous-jacents du profil identifié. Mais il est possible aussi de l’intégrer de façon simple dans des formations « métiers » (négociation, management, gestion de crise…) ou comme ici dans des activités plus ludiques et conviviales.
Imaginez quatre balances avec donc huit polarités. Il s’agira de comprendre d’une part sur quel coté nous préférons fonctionner, d’autre part que dans certains cas mieux vaut adopter une autre attitude et enfin de le faire sans trop attendre sous peine de consommer de l’énergie inutilement. La surdose de bon stress pourra être aussi néfaste que celle de mauvais stress si elle empêche de se maintenir en veille permanente et équilibrée avec peu d’énergie. Il est toujours étonnant, lors d’une dégustation à l’aveugle, de s’apercevoir par excès de confiance que l’on vient de boire un vin blanc alors que l’on pensait boire un rouge ! Par ailleurs, dire et admettre qu’il y a plusieurs façon de fonctionner est facile. Comprendre que le comportement de Pierre, Paul et Julie sont différents par leur génétique, leur histoire et leur environnement de vie et que parfois il convient de se mettre à la place de l’autre l’est moins. Pour celles et ceux qui connaissent le modèle d’Hermann, je dirais que les deux méthodes ont le même cœur mais que le MBTI rajoute la couleur au tanin.
Passons maintenant en revue ces polarités en relation avec la dégustation de vin. La première balance concerne le ressourcement. Nous découvrirons les dégustateurs plutôt « extravertis » (E) car ils iront spontanément au contact confronter leurs ressentis quand les « introvertis » (I), parfois trop dans leur bulle, attendront un premier avis interne avant d’éventuellement le faire, de peur de se tromper. Nous inciterons sans doute les « E » à prendre davantage de temps de réflexion et laisser les « I », dont le filtre est plus épais, admirer les nuances, la limpidité et trouver par eux-mêmes plutôt qu’être influencés, sauf s’ils le demandent une fois le stress de l’ignorance arrivé.
La seconde balance concerne la façon de collecter les informations. Certains, très voire trop « concrets », (S) avanceront pas à pas et détecteront assez rapidement les aromes, les senteurs. Les autres, auront d’abord besoin d’un peu de recul, d’assembler certains éléments et de voir certaines images et liés à ce qu’ils voient ou ressentent (N) pour ensuite venir sur le terrain des détails. Les priver de ce chemin différent les privera certainement d’une appréciation juste des goûts et des odeurs généralement reconnues.
Ces derniers pourront ensuite essayer d’emmener les « S » s’ils le peuvent, sur leur terrain pour découvrir autre chose que des détails.
La troisième polarité s’attache à la prise de décision, à la déclaration d’affirmation de ce qu’ils ont trouvé sur les arômes, les terroirs, les régions, les maturités. Certains, ayant la tête froide (T), auront trop tendance à faire confiance à la « pensée logique », aux critères objectifs, en n’imaginant pas qu’ils puissent se tromper d’arôme, de cépages ou d’année car ils ont tout passé en revue méthodiquement et par déduction ! Alors que d’autres, qui décident souvent avec le cœur, à l’affectif (F), au « sentiment », prendront le risque de se lancer dans leur ressenti. Une fois la bonne réponse tombée, les premiers pourront la discuter pour sauver le processus (T) quand d’autres essaieront de relativiser en disant que l’erreur est humaine (F) pour ne pas perdre la face.
La quatrième et dernière balance définit le fonctionnement général. Certains seront organisés (J), « structurés », agiront souvent trop par anticipation et seront stressés si un événement imprévu arrive comme par exemple un changement de vin, voyant arriver du blanc alors qu’ils s’attendent au rouge. Peut-être devraient-ils plus souvent se confronter à certains imprévus ou les imaginant pour s’adapter. D’autres, plus «flexibles » (P), parfois trop souples, aimeront la découverte en exploitant leur force mais peut-être auront-ils parfois intérêt à mieux se préparer au programme prévu à l’avance pour être performant.
Existe-t-il un profil du meilleur dégustateur ? Celui qui pense, qui ne pense pas ? Qui pense trop ou trop peu et pas au bon moment ? Chacun peut déguster de façon équilibrée mais avec plus ou moins d’efforts avant ou après avoir passé la ligne imaginaire de l’action. S’agissant de savoir si les femmes apprécient plus que les hommes, Les statistiques MBTI/CCTI sur les questionnaires vie courante, réalisés depuis de nombreuses années, apporteraient certains éléments de solution qu’il conviendrait de consolider lors des stages. Sur les quatre balances, et sur le même nombre de population, les femmes apparaissent un peu plus « concrètes » que les hommes mais elles décident généralement en se mettant beaucoup plus « à la place » (F) et de façon conciliante que les seconds qui montrent plutôt un esprit de compétition (T) … même pour trouver un cépage ?